La rénovation énergétique des bâtiments d'après-guerre : défis et solutions
Publié le 01/08/2024

La crise du logement d'après-guerre en France a engendré une vague de constructions qui font l'objet d'oppositions apparemment inconciliables entre les acteurs de l'urbanisme et du patrimoine, sans oublier les responsables de l'habitat social, notamment concernés. . par la gestion de ce parc immobilier.

Défis de la rénovation énergétique des logements d'après-guerre
L'architecture des années 50 à 70 est un terrain d'expérimentation de grands concepts architecturaux élaborés autour du vivre-ensemble tout en renouvelant la forme même du bâtiment et de la cité. C'est également une période de précipitation pour réduire le mal-logement national par un financement de construction maîtrisé.
La durée de vie d'un bâtiment ou sa consommation d'énergie n'entrent pas encore en ligne de compte dans le choix de matériaux de qualité et d'équipements performants. Cependant, comment envisager la rénovation énergétique des logements et du tertiaire d'après-guerre dans une conception durable sans trahir le geste architectural ?
Travaux de rénovation ou nouveau projet immobilier ?
Faut-il envisager systématiquement la démolition ? C'est souvent synonyme d'un financement élevé, d'un casse-tête pour le relogement des locataires sans oublier la parfaite ignorance d'une certaine sobriété de moyens de construction.
Chaque étude doit prendre en compte la performance actuelle du parc immobilier, l'intérêt patrimonial des façades et l'attachement des habitants aux lieux via une consultation préalable. Il est ensuite possible de transfigurer une façade pour instaurer une nouvelle trame ou encore augmenter l'habitabilité du logement en "poussant les murs". Lorsque la façade est devenue une référence architecturale, des réductions de besoins en énergie "masquées" restent envisageables, comme à l'université de pharmacie de Marseille.
Isolation thermique et performances énergétiques insuffisantes
Les façades béton, signature de cette période architecturale, n'affichent pas de bons résultats d'isolation thermique et de conception durable. L'isolation intérieure, aussi bien acoustique que thermique, est quasi inexistante dans le projet immobilier d'origine. Enfin, les portes et les fenêtres n'offrent plus l'étanchéité et les performances thermiques attendues.
Un état des lieux qui s'aggrave souvent de caractéristiques architecturales spécifiques, comme de grandes surfaces vitrées ou des façades complexes, qui compliquent les travaux d'isolation par l'extérieur.
Des pathologies aggravantes du bâtiment
La présence d'amiante dans les bâtiments de cette époque apporte une certaine complexité de mise en œuvre et engendre des coûts supplémentaires conséquents. Rattraper des standards de construction peut être un véritable défi notamment en termes d'accessibilité dans les immeubles de grande hauteur ou ceux ayant des structures porteuses complexes.
Peut-on réussir la transition énergétique des logements d'après-guerre ?
L'engagement de l'université ou de la ville dans un projet de rénovation des bâtiments d'après-guerre reste parfois insuffisant face à l'ampleur des objectifs. La loi Climat et Résilience accompagne désormais les travaux énergétiques grâce notamment au dispositif France Relance, à l'instar du quartier Triolo édifié par Claude Guislain à Lille.
Un partenariat solide doit s'engager sur ces travaux entre l'architecte et les corps d'état pour répondre à un engagement de délais et une obligation de résultats notamment en termes de consommation d'énergie. L'efficacité énergétique et l'emploi de matériaux durables restent toutefois compatibles avec le respect du patrimoine du XXe siècle : la rénovation de l'école d'architecture de Montpellier illustre parfaitement la coopération entre maîtrise d'œuvre et mandataires dans le cadre du programme de transition énergétique en France.



Solutions pour la rénovation énergétique des bâtiments d'après-guerre
Les travaux d'isolation thermique
Pour améliorer les performances thermiques d'un immeuble de bureaux ou d'habitat social d'après-guerre, on peut opter pour une opération d'ITE (isolation thermique par l'extérieur). L'application d'un matériau isolant durable sur les façades extérieures des bâtiments améliore considérablement l'efficacité énergétique sans réduire l'espace intérieur. Il protège la structure du bâtiment après traitement des pathologies et garantit une bonne ventilation sous paroi.
Cependant, il est nécessaire de vérifier si l'identité architecturale de la façade peut être réinterprétée. Si l'immeuble n'est pas recensé en tant que patrimoine remarquable du XXe siècle, la mise en œuvre d'une isolation extérieure et d'un bardage est une occasion idéale pour proposer une nouvelle trame à l'ensemble, apporter de la cohérence avec les codes couleurs du quartier qui a, lui aussi, évolué au cours des décennies. La requalification de la façade en ITE permet par ailleurs de fermer des espaces énergivores comme des loggias ou des escaliers pour améliorer la performance du bâtiment. C'est également l'occasion de procéder à des travaux de mise aux normes incendie et permettre l'accessibilité du bâtiment ou encore de résidentialiser de grands ensembles.
Dans le cas contraire, on peut envisager l'ITI (Isolation Thermique par l'intérieur), c'est-à-dire la pose de matériaux isolants à l'intérieur des murs existants. L'opération a l'avantage de ne pas modifier l'apparence des bâtiments et peut s'avérer moins coûteuse. Cependant, elle réduit l'espace habitable et demeure moins efficace pour éliminer les ponts thermiques.
Enfin, l'installation de toits végétalisés améliore l'isolation et réduit l'effet d’îlot de chaleur en ville. Il contribue à la biodiversité et améliore la vue depuis les logements.
Remplacement des portes et des fenêtres
Dans tous les cas de figure, il est fortement recommandé de remplacer les menuiseries extérieures du bâtiment, y compris celles des parties communes ou techniques. De nouvelles fenêtres offrent une excellente étanchéité et une isolation thermique optimale sans oublier que l'aération intégrée permet de ventiler les pièces. L'air intérieur est plus sain et la chaleur est mieux répartie dans les logements. Lorsque l'exposition ou le climat l'exige : il est possible de prévoir des vitrages spécifiques pour contrôler l'apport solaire ou des joints d'étanchéité à l'air supplémentaires.
Systèmes de Chauffage et de Ventilation
La plupart des immeubles d'après-guerre comportent d'anciens systèmes de chauffage énergivores. Selon la disposition du bâti, il est préférable de le remplacer par des chaudières à haute efficacité, pompes à chaleur, ou un système de chauffage urbain. Pour garantir une meilleure maîtrise des dépenses énergétiques au niveau individuel, on peut opter pour une installation de thermostats programmables.
Ventilation double-flux
En amont de projet, il est possible d'étudier la faisabilité d'une ventilation mécanique contrôlée (VMC) double flux pour récupérer la chaleur de l'air extrait et préchauffer l'air entrant.
Production d'énergies renouvelables en auto-consommation
L'isolation des murs dégage des économies d'énergie importantes. Pour améliorer considérablement les critères de développement durable, l'auto-production d'énergie est de loin la meilleure option. On peut envisager un mix énergétique entre les panneaux solaires photovoltaïques, les chauffe-eau solaires, ou les systèmes de chauffage géothermique.
Étude, diagnostic énergétique et planification de la rénovation
La réalisation d’un audit énergétique permet d'identifier les principales sources de déperdition thermique et de définir les priorités d’intervention. Chaque solution d'amélioration du bilan énergétique peut ensuite être pondérée par des critères esthétiques et patrimoniaux ou encore la disponibilité des aides gouvernementales.
Pour optimiser la programmatique, il est très utile de réaliser des simulations thermiques dynamiques afin de respecter les critères de confort d'été et d'apport de lumière naturelle.
Sensibilisation aux travaux et formation au développement durable
Particulièrement lorsqu'il s'agit d'un chantier de rénovation en habitat social, il est indispensable d'informer les occupants sur les bénéfices des améliorations thermiques et esthétiques de la résidence. Cette consultation est une occasion de confronter une conception de programme de rénovation avec l'expérience des utilisateurs. Un bâtiment d'après-guerre porte l'Histoire mais aussi celle des occupants. Il représente un nouveau départ pour les plus âgés concernés par les vagues migratoires des années 60-70, un ancrage pour les générations suivantes, construites autour de cette identité de territoire. La concertation est une étape importante pour partager une réinterprétation architecturale du patrimoine d'après-guerre, proposer de nouveaux usages et susciter l'engagement des occupants.
En combinant ces différentes stratégies, il est possible de réduire significativement les consommations énergétiques et d’améliorer le confort thermique des bâtiments d’après-guerre tout en respectant les prérequis architecturaux et financiers du projet.



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